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28 March 2011

FUNK-U Magazine: Frederic Yonnet Featured in France’s FUNK-U #14

Frédéric Yonnet : Résident américain depuis dix ans, l’harmoniciste français préféré de Stevie Wonder, Prince et Erykah Badu était en transit à Paris pour une rencontre chaleureuse avec Funk-U. Blow your harp, Fred !

Download the article,  watch a performance recorded during the interview or check out all references to Yonnet on FunkU.fr

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Funk-U : Peux-tu te présenter à nos lecteurs?
Frédéric Yonnet: Je m’appelle Frédéric Yonnet, je suis un harmoniciste français vivant aux Etats-Unis. Le public français a eu récemment l’occasion de me voir jouer avec Stevie Wonder et Prince.

Quels sont tes premiers souvenirs musicaux?

Mes parents m’ont exposé très tôt à la musique et j’ai eu la chance. Dès mon plus jeune âge, j’ai fouillé dans les disques de mon père et j’ai découvert les albums de Jimmy Smith et d’Aretha Franklin et je passais des heures à jouer avec la platine.

Pourquoi avoir choisi l’harmonica?

Un coup de bol. Je voulais être batteur à la base. J’ai longtemps travaillé la batterie, mais je me suis vite rendu compte que mon approche musicale n’était pas une approche de suiveur, mais plus une approche de leader. Quand je jouais de la batterie, les membres du groupe me demandaient d’être plus derrière. Le côté pratique de la batterie a été aussi comblé par l’harmonica. Avec une batterie, il faut une voiture, un local pour répéter. L’harmonica tient dans la poche, il n’est pas cher, on peut répéter partout et on n’a pas besoin d’électricité. En plus, je me suis rendu compte assez tôt que l’harmonica n’avait pas vraiment été développé dans les genres de musique qui m’intéressaient. Je me suis dit qu’il y avait peut-être une opportunité.

As-tu commencé par jouer du chromatique ou du diatonique?
J’ai commencé par un diatonique. En terme de palette de couleurs, le diatonique est plus expressif. On peut vraiment le faire sonner comme une voix humaine, un saxophone, une guitare ou un piano. On peut aussi en sortir des émotions profondes. L’harmonica chromatique est plus concentré sur l’harmonie que sur les « effets spéciaux » sonores. À mon oreille, il ressemble plus à un instrument précis comme le

bandonéon. L’expressivité qu’on arrive à obtenir avec les mains sur un harmonica chromatique n’est pas aussi facile d’approche qu’avec un diatonique.
L’harmonica est très présent, entre autres, dans une musique comme le blues. Il l’est beaucoup dans le jazz, la soul ou le funk, tes musiques de prédilection.
Ce sont les musiques auxquelles je m’identifie le plus. J’aime bien le blues, mais ce n’est pas ce qui me donne le plus envie d’aller de l’avant. Quand je suis tombé amoureux de cet instrument, je me suis rendu compte qu’il était vraiment ancré dans le blues, la country, le rock, mais que ce sont aussi des stéréotypes, des idées préconçues. Il existe dans d’autres univers, mais pas pour le grand public. Pour moi, c’était donc une opportunité extraordinaire.

Quel a été ton premier groupe en tant qu’harmoniciste?
C’était ici, à Paris, avec les Blue Fever. On marchait énormément en Espagne. J’ai ensuite fait partie de Lol, le groupe de Nulle part ailleurs, sur Canal Plus. Je travaille encore avec quelques musiciens, dont Patrick « Feedback » Ferbac, qui était le percussionniste du groupe et qui est aujourd’hui directeur musical de Grand Corps Malade.

C’était dans les années 1990. Quand es-tu parti de France pour tenter ta chance aux Etats-Unis?
J’ai commencé à m’aventurer aux Etats-Unis en 1999, mais je m’y suis vraiment ancré en 2001, juste après le 11 septembre. Le transfert a été facile, car le public américain a toujours été plus ouvert à l’innovation en ce qui concerne le jazz, tandis que le public européen est plus conservateur.

C’est en jouant aux Etats-Unis qu’on t’a vraiment découvert en France, notamment grâce à tes concerts aux côtés de Stevie Wonder. Comment l’as- tu rencontré?
C’était en 2006. La première fois que je l’ai rencontré, c’était à Los Angeles, aux Grammies. Le comédien Dave Chapelle, un ami commun, présentait Sly. On était backstage avec Dave, et j’avais l’impression d’être dans un magasin de disques où tous les disques étaient vivants (rires). À un moment, on passe dans un couloir et je vois écrit Stevie Wonder sur un mur. Dave me l’a présenté. Sur YouTube, Dave raconte cette histoire et comment Stevie m’a posé des questions sur l’harmonica avec lequel je jouais. Je lui ai demandé s’il connaissait la marque de mon harmonica qui est un Seydel, un fabricant allemand. Il ne la connaissait pas, j’ai donc sorti mon harmonica
de ma poche et je lui ai joué un de ses morceaux. À la fin, Stevie m’a demandé si je jouais d’un chromatique, ce qui a été un énorme compliment pour moi, car le son est complètement différent et parce qu’il en jouait depuis son plus jeune âge. Il connaît la différence technique qui sépare ces deux instruments mieux que personne, et il est aussi friand de la palette de couleurs du diatonique.

De Stevie Wonder, tu es passé à Prince.
Prince, je l’avais rencontré avant, une première fois chez lui, dans sa résidence 3121 à Beverly Hills. On avait essayé de communiquer, mais le personnage étant ce qui il est, il ne s’est rien passé. Stevie a donné ensuite un concert au Madison Square Garden
de New York en novembre 2007. On n’a pas discuté non plus ce soir-là, car après sa performance musicale en guest, Prince a disparu comme il est apparu. Il a fallu que je sois réinvité à une autre soirée dans une autre de ses propriétés à Beverly Hills. C’était encore après les Grammies, j’étais avec Dave Chapelle, il m’a présenté à Prince. Je lui ai demandé s’il se souvenait de la soirée du Madison Square Garden mais il ne s’en rappelait pas du tout. Dix minutes plus tard, alors que j’étais en train de discuter avec Anthony Hamilton, quelqu’un s’arrête derrière moi et me dit : « mais tu ne jouais pas pour Stevie, tu jouais « avec » Stevie ! ». C’était Prince.
C’est à partir de cette période-là qu’il a commencé à m’appeler régulièrement, il y a deux ans maintenant.

Avant ton arrivée, l’harmonica était presque absent de la musique de Prince.

Il m’a semblé voir un DVD où un harmoniciste faisait une apparition lors d’un concert (Rave un2 the Year 2000, ndr).

Avant toi, il y avait une section cuivres conduite par Maceo Parker dans le NPG. On a l’impression que tu l’as remplacée à toi tout seul!
Je ne sais pas si on peut dire ça. Connaissant Prince, il ne s’agit pas d’un remplacement mais d’une exploration de nouveaux horizons. J’utilise une section cuivres dans mon album. Elle procure une couleur, une énergie et une dynamique qui n’est pas remplaçable. Même chose pour l’harmonica, qui définit une autre couleur.|

Tes capacités d’improvisation ont dû beaucoup plaire à Prince.
Oui, et d’autant plus que je ne connaissais pas les morceaux avant de les jouer sur scène. Je les découvrais en même temps que le public. C’est bien et pas bien en même temps. Ca me permet d’être spontané et je suis un peu sur la sellette car je suis obligé de faire attention à tout ce qui se passe, mais d’un autre côté, je sais que le public le ressent. Il perçoit que certaines choses sont efficaces alors que d’autres sonnent plus comme des tentatives. Ca peut porter préjudice au résultat.

Gardes-tu un souvenir particulier de cette tournée 2010 aux côtés de Prince?
Il m’a scotché tous les soirs d’une façon différente, et c’est ça qui est incroyable avec lui. Il arrive a toujours surprendre. Ca force à se reconsidérer
en permanence, à se remettre en question. Ca été une très très bonne école. On ne s’habitue à rien et on reconsidère tout à chaque fois. Tout ce qui est ancré doit être reconsidéré, et c’est ce que j’essaie d’entretenir en moi dorénavant.

Parle-nous de ton album Reed My Lips, dont tu proposes les works-in- progress sur www.fredyonnet.com.
Dans le même esprit de changer ce qui existe et de profiter d’un problème pour en faire une opportunité, je me suis retrouvé dans une période où
j’ai commencé à travailler sur des morceaux. Plus je rencontrais de monde, et plus j’avais envie de les incorporer dans mon projet et du coup, le projet a pris du retard. Je me suis dit qu’il fallait profiter de cette opportunité pour partager la musique telle qu’elle est aujourd’hui et tenir compte des retours pour créer une sorte de « CD réalité » où l’on pourrait écouter et comparer les versions 1, 2 ou 3 d’un morceau et faire des suggestions d’invités, monter la basse, baisser la basse, ajouter des cuivres.
Ca peut donner quelque chose de très intéressant et qui n’a jamais été fait, et c’était ma motivation première.

Quelle sera la couleur musicale de Reed My Lips? Entre le jazz et le hip-hop. Un producteur de hip-hop de Brooklyn m’a envoyé des beats que nous avons rejoué avec mon groupe, et on traite ces morceaux comme des morceaux de jazz en prenant compte de l’essence hip-hop. L’album mélangera les influences nu-soul et hip américaines et une approche européenne avec des musiciens de France et des Etats- Unis. Il y aura aussi trois morceaux chantés, dont un par une artiste noire- américaine.

Qui sont les musiciens qui vont t’accompagner sur cet album? J’ai eu la confirmation de la participation d’artistes avec qui j’ai eu l’occasion de travailler, mais chut (rires)!

PROPOS RECUEILLIS PAR SLYSTONED
FRÉDÉRIC YONNET REED MY LIPS (WWW.FREDYONNET.COM)

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